Infos Covid-19

Le 29 mars 2020

Soyons responsables



Nos équidés ont besoin de soins, quotidiens, périodiques, ou occasionnels.

Face à la situation sanitaire actuelle, comment gérer tout ça au mieux ?

Comment faire simple ? Quelles consignes claires peut-on diffuser ?

Une courte explication en préambule, pour bien comprendre le raisonnement qui suivra.

La moitié des gens atteints du Covid-19 sont asymptomatiques. Ce qui veut dire que vous, moi, sommes peut-être porteurs du virus sans le savoir, et pouvons contaminer d’autres personnes qui elles, tomberont malades. Rajoutez à cela le temps d’incubation de 14 jours, et vous avez les raisons du confinement actuel.

Prenons une personne atteinte du Covid-19, vous, moi, s’occupant de chevaux, ou de son cheval. Immanquablement, elle déposera des particules contaminantes sur la couverture, le licol, sur les poils de chaque cheval dont elle s’occupe… Nous avons tous vu ces images de gens qui s’occupent de patients atteints, ils sont en combinaison complète, gants, tunique, lunettes, charlotte, etc. Parce que sans cet équipement complet, le virus passe d’office d’une personne à l’autre. Les mesures de
distanciations servent à ça.

A partir de là, qui pour s’occuper de nos chevaux, et dans quelles circonstances ?

Une seule personne, même contaminée, qui s’occupe d’un cheval, pas de soucis.

Plusieurs personnes s’occupant du même cheval, les problèmes commencent. Dans les écuries, les soigneurs, palefreniers s’occupent des chevaux, c’est indispensable. Lorsque chaque propriétaire rentre dans l’écurie pour monter ou s’occuper de son cheval, les risques de contamination se multiplient. C’est la raison pour laquelle, en France, les propriétaires de chevaux en pension n’ont plus accès aux écuries. Chaque personne qui rentre dans l’écurie peut être porteur du virus, et contaminer tout le monde.

Les professionnels équins suivent le même raisonnement.

En rentrant dans une écurie, on peut se faire contaminer, ou contaminer l’écurie. D’autant qu’en Belgique, l’accès des écuries est resté libre pour les cavaliers- propriétaires. Le risque de contamination y est donc élevé.

Le choix le plus logique pour les professionnels est de limiter les interventions à celles qui sont strictement indispensables. Et dans tous les cas, bannir les déplacements d’écurie en écurie. La plupart des professionnels sont itinérants, et quoiqu’on fasse, si un cheval est contaminant, celui qui s’en occupe emportera le virus avec lui.

Strictement indispensable, où est la limite ?

Strictement indispensable : sans une intervention immédiate, la santé se dégrade à court terme.

Pour rappel, nos services de santé se sont mis dans la même configuration. Tous les soins non-urgents ont été reportés. Le raisonnement est le même.

Alors bien sûr, il fait beau, les journées rallongent, on est confinés, on a tous envie de profiter de nos chevaux. Mais soyons clair, monter son cheval n’est pas strictement indispensable à sa santé…
Les vétérinaires ont une ligne de conduite simple. Si le cheval présente un défaut de santé, et que sans intervention son état se dégraderait, il intervient. Dans les autres cas, si le cheval peut attendre
(le cheval, pas vous), il reportera sa visite. Ajoutons que les vétérinaires sont les mieux équipés pour se prémunir de la propagation.

Les ostéopathes prodiguent des soins non urgents dans la plupart (voire la totalité) des cas. Si le cheval ne peut travailler sans ce traitement, son état ne se dégradera pas pour autant. Le cheval sera au repos, certes. Mais ce n’est pas un soin indispensable et urgent.

Les dentistes équins auront le même raisonnement que votre dentiste. Essayez de prendre un rdv pour un détartrage, et vous verrez. Sont considérés comme urgents et indispensables les abcès dentaires par exemple. Tout le reste peut être reporté.

Les maréchaux-ferrants sont malheureusement, et malgré eux, de par leur équipement (tabliers, outils,…) et leur itinérance, de parfaits vecteurs pour le Covid-19. Même raisonnement, n’intervenir que si l’état de santé du cheval se dégraderait sans son intervention. Très peu de cas en maréchalerie rentrent dans cette catégorie. Les abcès, les fourbures aigües, les boiteries aigües (grade 4 ou 5/5). Tout le reste peut être reporté. Un fer perdu, un délai de ferrage qui s’allonge trop, obligera peut-être à arrêter le cheval momentanément, mais son état de santé ne se dégradera pas à court terme. Même si les pieds
s’abîment, ça repoussera…

Les consignes données par l’Union Nationale des Patrons Maréchaux-Ferrants de Belgique sont très claires à ce sujet.

Alors comprenez bien que tous ces professionnels qui vous opposent un refus si vous les contactez ne le font pas de gaieté de coeur. Non seulement ils se privent de revenus, mais en plus ils savent que lors de la reprise, ce sera l’enfer total.

Si ils limitent leurs interventions, c’est parce qu’ils ont bien compris le raisonnement ci-dessus. Ils le font parce qu’ils respectent leurs clients (et ne veulent pas vous contaminer). C’est de l’intérêt général également. Chaque jour supplémentaire où le virus circule, rallonge le temps de confinement… rappelez-vous, 14 jours d’incubation… Ce n’est pas dans l’intérêt des chevaux qui attendent, ni des
professionnels qui se privent de revenus.

Alors, si vous harcelez votre maréchal-ferrant, votre ostéopathe ou autre pour qu’il vienne quand même (parce que vous le valez bien, hein..), vous participez à la propagation du virus. De plus vous harcelez quelqu’un qui a fait le choix de vous respecter, qui a fait le choix du sacrifice personnel, qui se prive de revenus dans le bien commun.

Rajoutons pour terminer que si quelques professionnels se déplacent encore, c’est soit qu’ils n’ont pas compris l’importance du confinement, qu’ils n’ont que peu de respect envers leur clientèle, ou qu’ils sont étranglés par leur trésorerie. Mais dans tous les cas, c’est au détriment d’une résolution rapide de cette épidémie…

Donc, soyons responsables.

Si les directives gouvernementales paraissent floues au sujet du monde équin, c’est seulement parce qu’ils ont d’autres chats à fouetter, et que donc personne ne s’est encore penché sur notre sujet. Soyez certains que s’ils le font, tout sera bloqué, totalement… !

Donc, soyons responsables, comme le sont déjà la plupart des acteurs de la filière :

Si l’intervention d’un professionnel n’est pas strictement indispensable, si la santé du cheval ne se dégradera pas à court terme, on reporte.

Toute autre considération n’est pas recevable.
Merci à tous de suivre cette ligne de conduite, la seule possible…



Didier Thiébaut
Maréchal-ferrant
Ostéopathe équin